La Tribune de Genève perd le sens de la justice fiscale
Dans son éditorial du 4 décembre intitulé « Genève perd le sens de la justice fiscale », la Tribune fustige le fait que les pauvres ne paient que 25 frs d’impôts. Oui, les pauvres. Parce qu’à Genève, avec son coût de la vie, ses primes maladies, ses loyers, avec un revenu de 75’000 annuels pour un couple avec deux enfants, soit 3250 frs par mois par personne, c’est bien de pauvreté qu’il s’agit.
Passons sur le fait que 93’000 salarié-e-s à Genève doivent se contenter des salaires de misère que leurs versent leurs patrons. Passons sur le fait que ces derniers, et les partis qui les représentent, se soient érigés en apôtres du partenariat social pour refuser l’introduction d’un salaire minimum légal à 4000 frs, ce qui aurait permis à ces 93’000 salarié-e-s de payer un peu plus d’impôts, et de consommer un peu moins de prestations sociales. Passons sur le fait que dans certaines branches économiques, le salaire médian ne cesse de baisser à coup de dumping salarial et d’abus patronaux en tous genres. Passons enfin sur le fait que 60% des entreprises, sans que l’on ne sache trop pourquoi, ne paient aucun impôt sur le bénéfice.
Passons sur tout cela, et concentrons-nous sur la justice fiscale. Et que voyons-nous ?
Que la baisse linéaire de 12% d’impôts sur les personnes physiques voulue par le PLR en 1998 a permis de défiscaliser une part bien plus grande des hauts revenus que des petits.
Que le bouclier fiscal en vigueur à Genève permet à la tranche la plus élevée du revenu et de la fortune d’échapper à l’impôt.
Que les forfaits fiscaux, dont bénéficient les plus riches contribuables étrangers-ères, permet à ces derniers-ères de payer un impôt sans proportionnalité avec leurs fortunes.
Que les grandes banques qu’il a fallu sauver de la crise des subprimes de ne paient plus d’impôts depuis cette date.
Que les entreprises à « statut spécial » hautement rentables paient deux fois moins d’impôt que les entreprises locales.
Qu’afin de rétablir l’égalité fiscale (on n’ose pas parler de justice), le Conseil d’Etat s’apprête à diviser par deux l’imposition sur le bénéfice de toutes les entreprises.
Le constat est donc évident. A Genève, les salarié-e-s qui ne gagnent pas de quoi vivre sont de plus en plus nombreux-ses. Et à Genève, plus on a d’argent, plus l’Etat vous fera des cadeaux fiscaux. Oui, Genève a bien perdu le sens de la justice fiscale.
Davide De Filippo Secrétaire syndical SIT
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